Jour 3 à Ala Archa : retour l’Alplager.

« Quelle journée de galère » ! M’a-t-on écrit à propos de la journée précédente. Et je réponds quelle erreur d’appréciation !... Certes nous en avons un peu bavé, certes nous n’avons pas franchi notre col, mais quel bonheur que cette extraordinaire journée de montagne. Quelle journée inoubliable nous aurons passé dans cette sublime vallée, dans ces paysages grandioses, cette ambiance fantastique, et quel plaisir nous aurons eu à nous dépasser. Une journée galère ? Non ! Une journée physiquement difficile mais aussi assurément l’une des plus belles journées de notre séjour !

En attendant nous sommes bien à l’abri au refuge dans sa seule pièce correcte pour un sommeil amplement mérité ! Curieusement les lit superposés qui ont l’air neuf sont sponsorisés par RedFox, North Face et autres grandes marques. Les fenêtres sont équipées de double vitrage, bref, l’endroit et propice à une excellente nuit. Nous sommes fracassés de fatigue et bien que Marion ressente une petite gêne respiratoire le côté réparateur du sommeil qui s’annonce ne fait pas l’ombre d’un doute !

Je m’endors donc comme un bienheureux jusqu’à ce que je sois réveillé plusieurs dans la nuit soit par la soif (il ait une chaleur à crever !), soit par Marion dont la gêne respiratoire s’amplifie sans cesse. Inexpérimenté en la matière je songe à un début de MAM mais comme nous sommes redescendu de 600 mètres…Vers 4h30 du matin cependant elle ne semble vraiment pas bien du tout, elle a une sale mine, dit qu’elle a mal au poumons quand elle est couchée et se redresse souvent tant c’est insupportable, et finalement elle me fait presque un malaise. Bref…… Si c’est dû à l’altitude (qui n’est pourtant plus que de 3200m) il faut redescendre… Aussitôt dit aussitôt fait : nous plions nos sacs en 2 temps 3 mouvements (et incroyable : nous n’oublions rien au refuge !). En partant nous réveillons tout de même Paulo pour lui dire que nous prenons les devants et qu’il nous rejoindra probablement en cour de journée.

Dehors il fait encore nuit bien que la lune quasi pleine nous dispense une belle lumière gris-bleu qui non seulement nous permet de voir où on pose les pieds mais éclaire aussi tout le paysage, le refuge, les glaciers, les sommets. Tout est incroyablement silencieux, la lumière donne un air encore plus austère et encore plus impressionnant à tout ce que nous contemplons. Nous ne sommes pas encore partis qu’elle se sent déjà mieux… La station debout plus l’air frais je suppose ? Le temps de faire une ou deux photos et nous attrapons la sorte de piste tracée dans la caillasse en admirant silencieusement l’extraordinaire spectacle du lever du soleil sur les cimes qui nous cernent ! D’abord une sorte de halo au dessus des sommets de l’Est puis tout à coup un premier sommet qui s’illumine de jaune orangé à l’Est. Et ce petit point de lumière grandit de seconde en seconde pour grignoter peu à peu les pentes de ces montagnes élancées, sa lumière vive tranchant incroyablement avec le sombre du fond des vallées ! C’est vraiment féerique !

Est-ce le spectacle ? En tout cas Marion semble maintenant en pleine forme et dévale la caillasse comme un jeune cabri !!! Tant mieux car je ne cache pas que j’étais un peu inquiet en décollant ! Mais la descente devient rapidement une petite galère dans le pierrier instable de la moraine sur lequel d’ailleurs je me prends une jolie bûche ! Mais comme Marion ne m’a pas vu l’honneur est sauf ! Enfin la moraine prend fin et nous atteignons le premier replat de verdure formant un gradin suspendu au dessus de la vallée principale, il fait maintenant grand jour tandis que le soleil continue à dévorer les flancs exposés de la vallée. Un vallon adjacent est totalement barré par une énorme moraine frontale qui laisse présager d’un impressionnant glacier embusqué derrière que nous ne verrons pas. Une autre fois qui sait ?

Puis nous retraversons le gigantesque éboulis qui engloutie la rivière avant de revenir à l’emplacement de notre premier bivouac à l’ancienne station météo. Le soleil baigne déjà l’endroit de ses rayons bienfaiteurs, il fait une température délicieuse, il n’en faut pas davantage pour que l’endroit soit élu pour héberger notre petit déjeuner sur un rocher. Nous sortons donc tout l’attirail (réchaud, thé, bouffe,…) et nous installons et déjeunons en nous délectant sans fin du paysage enchanteur : le retour à la vallée verdoyante en bas, les glaciers étincelants en haut. Le moment est tellement délicieux que Marion se lance dans une fort belle sieste…

C’est Paulo qui l’en arrachera en nous rejoignant ici. Il a les yeux explosés, complètement rouges, « ça pique terriblement » dit-il… Il faut dire que c’est sans lunettes qu’il a effectué la longue montée au col hier, sur la neige ça ne pardonne pas ! Il a passé une nuit d’enfer et ce matin il pleure sans discontinuer. Comme je ne m’en sers pas je lui prête mes lunettes tandis que Marion déniche des gouttes dans notre pharmacie… On en prend soin du Paulo, il est tellement sympa. C’est donc le trio reconstitué que nous reprenons notre chemin dans une succession de paysages grandioses que nous n’avions pas tous vu à l’aller puisque nous leur tournions le dos, et là aiguilles, pics élancés, glaciers, couloirs enneigés rivalisent de beauté pour s’attirer nos regards.

Et nous voilà de retour à la terrible rivière à traverser. Cette fois nous avons beau chercher nous ne trouvons pas d’endroit qui pourrait nous permettre de franchir l’obstacle de ces flots enragés. En remontant le torrent nous tombons néanmoins sur une espèce de grosse planche à un endroit où la rivière se scinde en 2 bras séparés par une petite île de 1m50. Bien calée entre 2 grosses caillasses le premier bras est assez facile à traverser. Il n’en va pas de même pour le second ! C’est un bouillon terrible qu’il va falloir franchir sur cette saleté de planche trempée donc glissante ! Et pas moyen de la coincer solidement entre des pierres, cette fois c’est en équilibre sur le sommet de 2 rochers qu’il nous faut l’installer… Paulo ouvre le bal, ça passe mais la planche bouge… C’est mon tour. Armé de mes bâtons étirés au maximum je cherche à prendre appui sur le fond de la rivière mais la force de l’eau m’empêche d’aller jusque là, je me lance donc mais à mi-planche je la sens glisser doucement d’un de ces appuis ! Je manque de peu de tomber mais ne retrouve de stabilité qu’en revenant à mon point de départ… Je me suis fait une belle chaleur ! Mais je n’ai plus qu’à recommencer… Nous replaçons la planche au mieux et j’y retourne. Cette fois-ci j’y vas franco et traverse en 2 enjambées…. Il ne reste plus que Marion qui n’en mène pas large. Mais à par l’appréhension ça se passe sans encombre… Le plus dur est fait ! Maintenant c’est tranquille jusqu’en bas !

Le chemin du retour désormais facile est cerné de fleurs multicolores : grappes dressées mauves, sorte d’Ancolies violettes, mini arbustes, fleurs jaunes éclatantes, coquelicots jaunes ou rouges, petites oranges, grandes blanches, mini marguerites velues, edelweiss… Un feu d’artifice botanique ! En revanche en 3 jours nous n’aurons pas vu le moindre bestiau, pas même un lézard, à l’exception notable de notre espèce de hamster, un faucon et quelques cris de marmottes. Un peu maigre pour un endroit aussi sauvage.

Nous croisons un fou qui est en tain de se taper la montée et VTT ! Puis ce sont des groupes d’américains qui se promènent en famille, probablement des militaires de Bichkek en week-end ? En tout cas, ça commence à sentir furieusement l’écurie ! Et nous arrivons au grand replat final avec de nouveau la rivière à traverser. Mais ici pas de problème, la cuvette est immense, et les flots sont divisés en plein de larges bras peu profond et sans remous. Marre de me déchausser et de me rechausser, je traverse les 3 bras en godasses et suis de plus en plus stupéfait : mes pieds restent au sec ! Quelle étanchéité incroyable ! Bravo Salomon ! C’est autre chose que les Millet de Marion qui sont trempées au bout de 3 gouttes de rosée…

La rivière traversée, c’est le retour brutal à la civilisation ! Des familles de kirghizes sont monté en bagnole jusque là pour pique-niquer ! Il y a même une mariée dans une robe à peine plus grotesque que les tenues des autres convives… Tout le monde pique-nique, y’a pas de raison que nous y fassions exception ! Cette fois on se fait plaisir : comme nous repassons par Bichkek où nous pourrons reconstituer le stock nous dévorons tout ce qui nous passe sous la main et ainsi lesté pouvons terminer le petit kilomètre bitumé qu’il nous reste à accomplir pour atteindre l’Alplager. Nous n’avons plus qu’à nous trouver un taxi. Ce ne sont pourtant pas les voitures qui manquent mais malheureusement toutes sont déjà pleines ras la gueule ! Pour nous consoler de cette épreuve nous nous jetons sur la première piva (bière) qui passe… Ca fait du bien par où ça passe !

Et finalement Marion part à l’assaut des piétons pour nous trouver une voiture, mais les piétons en question sont eux aussi des touristes (anglais) à la recherche d’un véhicule. Nous étions 3, nous voilà 5… C’est peut-être notre chance car un type nous propose finalement de nous descendre dans son minibus jaune ce qu’il n’aurait sans doute pas fait pour 3 personnes seulement. La descente en bus se passe fort bien en regardant le paysage et surtout la terrible rivière qui ne connaît jamais un instant de répit, comment ne pas penser encore aux tarés de kayakistes qui à travers le monde se tapent des trucs pareil…

Bichkek enfin, le bus nous laisse à l’angle de Moskva et Sovietskaya. Il fait une chaleur hallucinante, une vraie fournaise ! Quel contraste ! Il y a 40 minutes, 1600 mètres plus haut on avait remis la petite veste et ici on supporte tout juste son slip ! Première vision : celle de cette babouchka sur le trottoir qui vend des fleurs et des framboises, une vision plus qu’ordinaire à Tashkent mais beaucoup plus rare ici. Nous rejoignons finalement en sueur la Guest-house où nous retrouvons notre anglais (celui qui avait ricané dans la nuit lors de l’épisode de Super chat), un fou qui est parti d’Angleterre à vélo jusqu’en Chine et qui est sur le chemin du retour… Il attend son visa pour le Kazakhstan…  Mais la Guest-house est surtout l’endroit propice pour la remise en condition des hommes et du matériel : douche chaude, tartinage de Biafine, lessive (pour une couleur d’eau moins opaque que prévu) !

Cela fait c’est direction le Rumstore pour reconstituer le stock de nourriture et aussi acheter des tas de cochonneries dont nous nous gavons sur un banc en observant le défilé des gens à l’allure moderne et occidentalisée, c’est une autre Asie Centrale que nous voyons ici. Il parait qu’Almaty (au Kazakhstan est encore le degré au dessus). Fatigués nous dînons à la Guest-house et y faisons un repas pantagruélique en discutant avec notre anglais, Paulo, un italien et les 2 sœurs chinoises, nièces du patron et filles du super poivrot qui déambule avec ses potes et copines tout aussi assoiffés dans la cour à la recherche de touristes munis d’un alcool quelconque qui se font engueuler quand même parce que ce n’est pas de la vodka…. Passons… Paulo nous parle ce soir la de la Réunion, de ses montagnes, de ses canyons ! Et il nous conforte dans notre idée d’aller y faire un tour là bas aussi, un jour…

Enfin c’est l’heure d’aller au lit mais pas sans eau ! Je sors donc pour en trouver et entre dans le troquet d’en face qui me réclame 4OO soms pour une bouteille ! L’enfoiré, ça vaut 20 soms !!! Je l’envoie paître, ce qu’il fait joliment… Je ne le regretterai même pas puisque je trouverai une bouteille pour 15 soms… Voleur !!!!

Comments

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Et bien,une nuit au Refuge à côté d'un petit boulet qui empêche son voisin de dormir, ça me rappelle Le Piméné !!!! Pourtant, je suis étonnée, la fille ne ressemble en rien au père quand elle a un pèt de travers !!!!! Et le matin, tout se dissipe comme un enchantement : étrange, étrange..... Non je plaisante, je me serai fait un mauvais sang d'encre et aurai pensé à déclancher le plan ORSEC !!!!! Petit boulet, change d'âne, hi, hi, hi !!!!